Le lycée, c’est terminé et pour ceux qui ont rendu leurs copies en 2013, une dizaine d’années se sont écoulées. On associe souvent les années lycée comme les plus belles notre vie. Elles sont souvent associées à l’insouciance, l’apprentissage de soi, la découverte de son corps et les premiers émois.
Entre choix professionnels qu’on nous demande dès quinze ans et à définir rapidement sur la plateforme appelée anciennement Admission Post-Bac – renommée ParcourSup –, la pression sociale accompagnée de son étiquetage et sa stratification souvent juvénile mais qui, cependant, a des répercussions sur le comportement des individus qui se prennent souvent pour les leaders de la cour d’école, la vie adulte semble avoir un goût amer.
Le harcèlement scolaire bien que décrié comme « mal », « inacceptable » et d’autres qualificatifs péjoratifs, personne ou peu de monde agit contre ce phénomène qui laisse une trace indélébile sur les jeunes pousses en voie de construction.
10 ans après, nous sommes des adeptes du stalking et une question nous traverse l'esprit : "que sont devenus ces bourreaux des coeurs et caïds des bacs à sable ?" Avant, il y avait Facebook qui nous permettait de jeter un coup d’oeil sur l’évolution de ces gens car, jonglant entre statut personnel « en couple » ou « c’est compliqué », photos prises avec un appareil photo numérique bas de gamme où les légendes se résumaient à des injonctions potaches et à des commentaires plus que primaires, l'information était là et accessible. Mais depuis, la plateforme s’est fait devancée par LinkedIn qui est devenu le nouveau Facebook professionnel et un CV online où des recruteurs en statut « Open to Hire » sont plus qu’actifs. Et c’est l’occasion d’en profiter pour regarder en toute discrétion, quel métier exerce désormais ces harceleurs à l’éthique plus que douteuse.
Des métiers bons pour la société, un passé douteux et une morale inchangée ?
Dans cet article, les noms ont été changés.
💉 Une médecin leader, populaire, bon élève mais rabaissante envers ceux des classes populaires.
Cette fille, on l'a voit tous venir. Elle est populaire, belle, issue d'une classe aisée et venant d'une famille de médecins. Et aujourd'hui, elle-même a ce statut et a fait des stages dans le domaine de l'humanitaire avant d'avoir ce titre. Mais si l'on creuse sous ce vernis d'exemplarité, Kate a été une fille qui méprisait ceux et celles qui ne faisaient pas partie de son groupe social et qui ne lui ressemblaient pas physiquement et financièrement. Bien qu'écraser les autres par les mots et faire des mêmes précurseurs sur Facebook ou des "private jokes" pour se moquer des gens sans trop viser, dans ce groupe si privilégié regroupant l'élite d'un lycée socialement fracturé, eux-mêmes étaient enclins à se piquer les uns les autres et à balancer des réputations qui partaient de rumeurs liées aux actions de certains qui se passaient dans leurs soirées sulfureuses et plus que privées. Comme quoi, même humainement, il n'y a pas de perfection.
📚 Une professeure des écoles aux mots condamnables.
En véritable moralisatrice, Mary a donné des leçons de vie à tout le monde mais ne les applique pas forcément bien au quotidien. Enfance heureuse, pas de problèmes familiaux mais pourtant, elle ne pouvait pas s'empêcher de critiquer les autres et de les rabaisser en jouant avec les stéréotypes de genre, d'ethnie... Au lieu de prendre la défense de ses camarades, elle préférait participer en gardant le silence, en observant et en continuant d'alimenter les propos des harceleurs et de se ranger du côté des leaders que des outsiders, cibles plus faciles à viser au quotidien tout en revenant vers les "harcelés" en mode sympa pour rester amis en pensant à haute voix : "au cas où, il.elle pourrait m'être utile". Elle aimait être au centre de tout. Les mots sont punissables et les actes voire le silence aussi, ça mérite un bonnet d'âne pour ceux qui enseignent aux plus jeunes et donc aux plus malléables. La conclusion est que de souffler le chaud et le froid, n'est peut-être pas la bonne opération.
⚖️ Avocate, un métier de loi, carré mais qui parfois relève plus de la comédie que de la justice.
On parle de justice sociale et d'éthique intacte sauf que lorsqu'on dissèque le cas de Donia, on peut se poser des questions par rapport aux métiers de loi. Harceleuse mais également harcelée. Cette première de la classe, stressée d'avoir des notes en dessous de 16, souvent déléguée de classe et meneuse dans l'âme, aimait se mettre en avant en riant fort, voire trop fort et parfois son mal être, celui d'être elle-même jugée, la conduisait à harceler à son tour. Peut-être que c'est en faisant ce jeu de rôle propre à celui des Indiens et des Voleurs qu'elle a trouvé la voie pour son métier et que le fait d'essayer de survivre au harcèlement en faisant subir sa peine aux autres était un moyen de dire : "dans ce pays, il n'y a pas de justice."
Ingénieur en punchlines novatrices mais destructrices.
Will était un jeune garçon drôle et assez populaire dans son genre. Mais quand il eût la possibilité de commencer une sorte d'harcèlement banalisé avec des blagues racistes, ce fût le début de la fin. Sa personnalité si solaire mise à l'épreuve par un wizz sur MSN, deux trois mots déplacés mais enfantins, et hop, c'était fini. Le masque tombe. Il s'acharne jusqu'à ce que la victime craque. Pour innover, il lui a créé un skyblog à son image, poste des commentaires ravageurs et insultants où les mots ne sont pas mâchés, se joue d'elle en se faisant passer pour quelqu'un d'autre sur un Internet, encore pixelisé, peu préventif et dominé par MySpace. Mais alors, à quoi sert cet acharnement ? En pur scientifique, la victime sert de rat de laboratoire pour que les gens s'alertent, prennent conscience des actes d'un harcèlement où la première définition est restée floue pendant bien longtemps et où les mots tellement lourds de sens ont explosé dans l'Elernmeyer au verre plus que fragile.
La vie non rêvée de ceux qui ont voulu écraser les autres, est-ce un retour du karma ?
Et il y a ceux qui ont eu un autre destin et ont été rattrapé par l’ascenseur social. Il y a un fossé entre le rêve, l'ambition et la réalité. Certains s’imaginent réussir et gravir les échelons un à un comme un des personnages de Stendhal ou Flaubert. On ne parle pas d’American Dream qui est une vaste illusion construit sur le néo-libéralisme et capitalisme américain mais de Provincial qui réussit à Paris, la capitale où tout est possible. Mais pour cela, être bon élève ne suffit pas, le mental est le plus important. 3 exemples pour illustrer ce propos :
☎️ Chargée de communication au lieu de journaliste cinéma, le "truc" par défaut.
Pendant longtemps, même si Garance était une bonne élève, elle aussi passait son temps à descendre les plus "chétifs", les plus timides, pour se donner de la valeur. Ayant des ambitions plus qu'honorables et des résultats aux examens qui font d'elles un exemple, elle voulait faire l'éloge des films qu'elle pouvait dévorer dans les salles obscures. Se voyant déjà dans la salle Grande Salle Lumière cannoise à noircir les pages blanches et à atteindre le Cercle des critiques cinéma, aujourd'hui, elle se charge de la communication et restée dans sa région natale. Garance vit sa vie de jeune vingtaine, toujours plongée dans la fiction des livres surnaturels.
📦 Manutentionnaire en marchandises au lieu de chef d'entreprise, une tuile.
Faisant partie des groupes qui se donnaient de l'importance et qui étaient pro-actifs sur Facebook, Sacha s'était auto-proclamé "Dieu vivant" pour la blague mais aussi pour la valorisation de son statut. Roulant dans un égotrip conséquent, il distribuait des "likes" à toutes les filles qu'ils appréciaient, postait sur le mur de chacune une photo d'elle avec un émoji "coeur" et les autres restaient sur le carreau comme évincées du jeu et marginalisées. En véritable petit chef d'entreprise, il distribuait les bons points à ses "employées" doublés de blagues sexistes et punissait les autres en leur attribuant avec rien, ce qui équivaut à la baisse de salaire, l'absence d'une promotion ou la suppression des fameux congés payés. Sauf qu'aujourd'hui, dans une vie moins mouvementée qu'au lycée, Sacha est rangé et, accumulant des petits boulots, s'offre une routine qu'il n'avait peut-être pas imaginée.
🛒 Vendeur de livres kawaii au lieu de réalisateur, la fin d'un film.
Le septième art fait des ravages et parfois, peu sortent de l'école de cinéma avec un job à la clé. Souvent, la galère est au "bout du film" et la possibilité de faire des métrage est plus que limitée mais rime davantage avec précarité. Dans les écoles de cinéma, il y a ceux, comme Ben, qui réussissent et sont primés lors des projections de fin d'année mais ne repartent qu'avec un bout de papier, un égo sur-dimensionné et un ticket vers Pôle Emploi Spectacle alors qu'ils n'ont fait que hiérarchiser les gens de leur promo en listant les bons et les mauvais techniciens de part et d'autre. Quand d'autres se réorientent et utilisent ce qu'ils ont appris puis utilisent les outils pour leur prochain métier ou projets professionnels, d'autres coupent définitivement le projecteur et se plongent dans la fiction des livres bien plus sexy qu'une réalité et un marché du travail impitoyables.
P.O.V positif + :
Dans le monde professionnel et surtout celui d’aujourd’hui où les places sont chères et où certains métiers sont en pleine mutation comme celui de journaliste, il en va de soi que les questions de l’orientation professionnelle et de la formation traditionnelle et théorique aient besoin d’une mise à jour afin qu’elles correspondent à la demande d’une nouvelle génération sur-informée.
Léa Salamé disait lors d'une conférence que ce métier tendait à évoluer et que certains influenceurs ayant une large communauté sur les réseaux sociaux et présents dans ce système médiatique, réalisaient des véritables enquêtes journalistiques. On pense à
Manon Bril,
Amélie de Fashion Quiche,
François Turel du Fossoyeur de Films et surtout le plus en date
Hugo Décrypte.
Si certains d’entre nous exercent des métiers sur-mesure grâce au pouvoir du digital, de la création de contenu afin de trouver du sens et de vivre de sa passion, d’autres se retrouvent au pied du mur et même s’il n’y a pas de sous-métier parfois, les harceleurs connaissent le revers de la médaille.
Pour parler + s'informer :
Je crois qu'il ne faut pas mettre tous les harceleurs dans le même panier (même si ouais, un harceleur devenu prof, c'est assez cocasse). En fait, il y a plusieurs profils de harceleurs. Alors, je ne dis pas que du coup ça excuse ce qu'ils font, hein ! pas du tout ! Ils sont parfaitement responsable de la souffrance qu'ils font subir aux autres. Mais le profil du harceleur qui veut se monter en descendant les autres, prendre le pouvoir sur le groupe, et tire du plaisir à rabaisser les autres, je ne crois pas que ce soit le principal. Il y a aussi d'anciens harcelés en souffrance, et d'ailleurs tu le rappelles dans ton article. Du coup, je ne sais pas, je suis un peu mal à l'aise de cet article. Aller voir ce que sont devenus les gens dont on était les souffre-douleur, et se satisfaire que Bidule, toute pomponnée et qui faisait sa diva, ait pondu 3 gosses et ressemble plus à rien, ça peut faire du bien sur l'instant, une espèce de revanche sur la vie, mais je ne crois pas qu'il faille que ça dépasse la sphère intime. Et puis, surtout, les harceleurs du lycée, qui avaient 15 ans et en ont peut-être 35 aujourd'hui, ont peut-être changé. Certains harceleurs se repentent, d'autres ne comprennent pas quel était le problème, c'est très humain, mais on ne peut pas savoir si c'est le cas pour les personnes qui nous harcelaient.
RépondreSupprimerJe suis d'accord, c'est pour ça que je nuance mon propos. Même si je crois certes naïvement au changement, je pense qu'il y a des injustices sociales. Certains prennent conscience du harcèlement causé, d'autres pas du tout et continuent leur délire de "pseudo-domination". Tout est relatif et c'est au cas par cas.
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